Sentir les besoins de ceux qui ne demande pas, qui ne veulent pas déranger, qui ne peuvent pas dire… modérer les demandes exagérées de ceux qui se croient seuls à être malade et au centre du monde… savoir être touchée sans s’effondrer, entourer, soigner, faire les bons gestes, avoir une hygiène irréprochable, ne pas mettre en danger, ne pas faire « trop » ou « à la place de » pour ne pas compromettre l’autonomie de la personne, répondre aux interrogations sans en dire trop, savoir écouter et accueillir la parole, toutes les paroles, tous les sentiments avec sérénité, rassurer sans mentir, voir ses propres projections et les mettre de côté pour être complètement disponible à la personne qu’on a en face de soi avec sa propre personnalité, son histoire, son vécu, sa sensibilité, ne rien rajouter à la réalité, ne pas avoir d’apriori, respecter la dignité de la personne, sa pudeur, ses choix, ne pas prendre pour soi l’agressivité, la colère, l’exigence de certains, comprendre, rester ouverte en toutes circonstances, sourire, avoir de l’humour et l’utiliser à bon escient, rire aussi parfois, souvent… être proche sans envahir… s’adapter en permanence aux nouvelles personnes, tant les patients que le personnel, les familles, ne pas craindre les horaires toujours changeants, les heures supplémentaires, les week-ends de 24h de travail(2x12h) et parfois plus… continuer à se former, à apprendre… et tout cela sans s’oublier, en faisant attention à soi (ce qui m’est le plus difficile… )
Et accompagner la personne jusqu’à la dernière porte, recueillir son dernier souffle, accueillir la douleur de la famille, être là, disponible, pour accueillir la plus grande vulnérabilité, comme hier, un dimanche pas comme les autres… elle était jeune, elle était mère d’enfants encore jeunes, elle ne voulait pas mourir, elle voulait voir grandir ses enfants, elle pleurait, puis elle se révoltait, elle luttait, elle souriait parfois quand elle avait moins mal, elle remerciait… jusqu’au bout elle a lutté… puis elle est partie, devant nous, dans les bras de sa sœur, et puis son visage enfin s’est apaisé… c’était la première fois, pour moi… bouleversant… je n’oublierai jamais.
Ce métier, si mal valorisé, si complexe et si riche, humainement parlant, intérieurement parlant, c’est le plus beau du monde, pour moi.
Pascale (5 décembre 2011)